Un nouveau recueil de poèmes de Giulio-Enrico Pisani
Accompagnons le poète, le journaliste, le critique d’art Giulio-Enrico Pisani, le temps d’une nuit et/ou d’une journée. A la découverte de ses mots, de ses vers qui s’inscrivent dans une heureuse harmonie, qui ont beaucoup de choses à nous confier, souvent très personnelles, et puis finalement, très proches des nôtres, de nos joies, de nos tourments, de nos humeurs.
J’ai appris ainsi que Giulio connut de belles amours à Bruxelles. Des amours qui bercèrent ses rêves d’adolescent remplis de grands principes et de nobles idées. Mais l’amour le plus passionné, notre ami, ne l’a-t-il pas offert à Bruxelles, à la ville ? Le poète dédie les lignes de son poème Bruxelles à Jacques Brel, à Adamo, à Robert Cogoi, et il l’offre à sa jeunesse qu’il a laissée là-bas.
Giulio-Enrico Pisani n’avait jamais pensé qu’un jour il se rait aussi âgé qu’il ne l’est aujourd’hui. Mais non, cher ami, certes tu es né en 1943, mais finalement tu n’es pas encore si âgé que cela. Moi aussi je fais partie des seniors, et alors, chaque âge de la vie nous offre des joies, ainsi que des peines. Ces quelques mots pour introduire ton poème Ephemerida : «Le futur n’est pas encore présent et le présent est seulement passant. Passant moi-même, que me reste-t-il, sinon un passé toujours présent ?»
Ce passé toujours présent, nous en possédons toutes et tous un lingot dans notre poche, attaché à un mouchoir dans lequel nous avons versé bien des larmes sans doute.
Jamais un poète ne meurt
Et puis, sans déconner l’ami, cesse de parler de ta vieillesse, car tu es encore un fin dragueur, ayant comme témoins bien de féériques créatures. Ne me contredis pas, parce que c’est bien toi qui a écrit ce charmant poème que l’on peut lire en page 9 de ton nouveau recueil, Au-delà du bel âge. Quand on reste frais dans la tête, Giulio, le bel âge est éternel. Il s’agit d’une flamme toujours vive, vivace et somptueuse.
Je l’offre à la lecture, à nos fidèles amies et amis du bon vieux Zeitung vum Lëtzebuerger Vollek : «Avoir dépassé le bel âge, mon ami, c’est quand s’arrêtant pour souffler un moment, on est absorbé par de charmantes jeunes femmes, hésitantes, mais le sourire engageant, pour te dire, non pas comme à la gare, pardi, telle pauvre créature à la pêche au client, «Tu viens ?», mais pour te demander, la brave dame, si tu es certain que tout va. «Vraiment ?». Avoir dépassé le bel âge c’est aussi entrer dans un bus de ton pas chancelant et voir se lever telle jeune et jolie femme que tu eusses pu draguer dans un autre temps. Ce n’est pas forcément, en toute modestie, ne plus les voir comme tu les voyais à vingt ans, mais laisser Eros céder à d’autres flammes, et moins qu’exiger, être reconnaissant, qu’elles soient comme elles sont, étrangères ou amies, bourrues ou aimables, l’œil froid ou attachant, sans faire entre sexe et tendresse d’amalgame, risquant de gâcher ce qui reste si charmant».
Quelque part, Giulio, je sais que tu penses que je n’ai rien compris à ton poème. C’est faux, ultimement faux et inexact. Tu restes brillant et tu seras brillant au-delà de la mort, parce que jamais un poète ne meurt, et que tu es éternisé à travers tes écrits, tes livres, tes nombreux articles.
Mes nuits sont plus folles que mes jours
Cela fait deux jours que le nouveau recueil de Giulio-Enrico Pisani m’accompagne. Mes nuits sont plus folles que mes jours, comprenant des dessins d’Arthur Unger, a été publié dans la collection Graphiti aux Editions PHI.
Arthur Unger est connu et reconnu dans de très nombreux pays, notamment en France, Italie, Allemagne, Belgique, Suisse, ainsi qu’en R.P. de Chine. Membre du Cercle artistique Luxembourg, il a obtenu le Prix Grand-Duc Adolphe en 1971. Il a plus de cent expositions individuelles à son actif, dont des rétrospectives à Paris, à l’Abbaye de Neumünster, à l’Espace H2O d’Oberkorn. Des musées à Shenzhen, Shanghai et Pékin ont exposé ses œuvres. En 2017, il a reçu le prestigieux «Phoenix Art Price» à Fenghuang, dans la province du Hunan, en Chine.
Les dessins d’Arthur Unger complètent merveilleusement bien la délicate ambiance qui se dégage du nouvel opus de Pisani.
Giulio-Enrico Pisani est à la fois un assembleur de mots, un bricoleur de vers et un sacré talentueux poète, au sujet duquel j’ai déjà dit tout le bien que je pense dans plusieurs de mes articles.
Voici un courriel reçu ce matin, du poète, alors que j’apporte les dernières retouches à mon article : «Contrairement à mon recueil Claudine, la majeure partie de mes poèmes, dans mon nouveau recueil, ne se réfèrent pas à moi-même, mais à du vécu et ressenti autour de moi et non pas à ce qui est, mais à ce qui peut être».
Un bourlingueur des mots
Si Giulio-Enrico Pisani est un bourlingueur des mots, il a également posé ses bagages en plusieurs lieux de notre bonne vieille Europe : naissance à Rome en 1943, puis Suisse, Belgique, Allemagne, pour enfin aboutir au Luxembourg. Ses noms et prénoms trahissent ses origines italiennes. Il a publié de nombreux livres, dont un grand roman historique Der Flug des Bussards. A deux reprises il a été distingué au Concours littéraire national, en 1998, pour un essai, et en 2002, pour de la poésie. Grâce à des nouvelles, il a également obtenu, à deux reprises, le Prix spécial Hans-Bernhard Schiff.
De Giulio-Enrico Pisani vous pouvez lire de façon régulière les présentations d’expositions dans les colonnes du Zeitung vum Lëtzebuerger Vollek.
On se souviendra de sa contribution exemplaire à l’ouvrage Nous sommes tous des migrants (voir mon article publié en date du vendredi 10 juillet 2009, en page 2 du Zeitung, sous le titre Giulio-Enrico Pisani et ses ami(e)s mènent une guerre impitoyable contre la fasciste Forteresse Europe : ne sommes-nous pas tous des migrants ?, ainsi que de son livre Charles Marx, un héros luxembourgeois, publié aux Editions du Zeitung vum Lëtzebuerger Vollek.
Il y a eu aussi le recueil de poèmes de Giulio-Enrico Pisani publié aux Editions Schortgen (www.editions-schortgen.lu) sous le titre Claudine, qui tient du roman, de l’élégie, de l’ode aussi. J’ai eu l’impression de parcourir un album photo. Tiens, je me permets de proposer à notre ami de publier une deuxième version de son livre, agrémenté cette fois de photos de Claudine, de leur couple, de leur existence. Mais ne serait-ce pas là donner au voyeur trop à déguster de cet amour si vaste, si profond, si exemplaire ?
Si j’apprécie toute la littérature de l’auteur, j’ai également particulièrement aimé son recueil La nuit est un autre jour, publié aux Editions Op der Lay (25, rue d’Eschdorf L-9650 Esch-sur-Sûre Tél. : 839742/ Fax : 89.93.50/ e-mail : opderlay@pt.lu/ www.opderlay.lu).
Sa belle philosophie
Giulio-Enrico Pisani a été et restera toujours éperdument amoureux de son épouse Claudine, la maman de leurs enfants. Claudine est partout présente, la musique de son rire, la lumière de son regard, la saveur de ses lèvres, la douceur de sa peau. Le poète éprouve encore et toujours, et probablement jusqu’à ce que pour lui sonne le glas, une véritable passion pour cette tendre et formidable créature.
Dans son recueil, le poète nous parle également de ces abcès purulents qui gangrènent la société : despotisme, interdits, superstition, ignorance, corruption, opportunisme, lâcheté, fatuité, machisme, jalousie, inconscience, fraude, vol, arnaque, racket, exploitation…
Il se fâche aussi contre la tyrannie commune, la peur quotidienne, la censure coutumière, les interdits ataviques prétendus religieux, l’oppression légale, omniprésente, bigote aveugle, cécité, déni de justice, misère, chômage, oisiveté forcée des forçats du farniente religieux au désert de perspectives et d’espoir.
Assez !
Il en a assez Pisani, et il a mille fois raison.
Il a mille fois raison quand il peste sur les conditions des migrants : «Va, pensée, sur tes ailes dorées ! Va, pose-toi sur les pentes, sur les collines, où embaument, tièdes et suaves, les fleurs ouvertes pour tous les voyageurs ! Salue les rives du Tibre, du Danube, de l’Isar ! D’une Terre, ta patrie, qu’ils veulent t’interdire, eux qui, venus d’ailleurs, n’y sont que passagers».
Lire le nouveau recueil de Giulio-Enrico Pisani, c’est l’accompagner, suivre le cheminement de ses pensées, de sa belle philosophie que j’apprécie depuis des décennies.
Merci Giulio pour ce très sensible recueil !
Michel Schroeder
Le secret des arbres
Le secret des arbres, qui l’aura percé ?
En vain bien des poètes tentèrent de découvrir
sous leur manteau rugueux et leurs branches agitées
ce que leur faux silence pouvait bien vouloir dire.
Faut-il interroger le vent lorsqu’il secoue
leur capiteux feuillage, leurs fruits ou leurs aiguilles,
lorsque de leur ancrage dans la terre il se joue
rappelant à l’homme qu’il vit sa vie grâce à leur vie ?
Et comment comprendre ce que nous Zéphir,
dès qu’entre leurs couronnes il entonne sa chanson,
fait frémir leurs racines, naître de leurs soupirs
des peintres et poètes les vibrantes créations ?
Giulio-Enrico Pisani